Les pratiques agricoles à l'origine des fuites d'azote
L'azote transféré aux cours d'eau provient :
- des fuites des bâtiments d'élevage ou des piscicultures (azote ammoniacal)
- du ruissellement de surface (qui concerne davantage le phospore que l'azote)
- pour l'essentiel, des nitrates qui s'infiltrent avec l'eau de pluie (lessivage, percolation).
L'origine de la percolation :
L'azote est nécessaire à la croissance des plantes. Les plantes cultivées captent l'azote dans le sol et ne lui restituent pas l'azote utilisé puisqu'elles ne se décomposent pas sur place. Des apports exogènes sont donc nécessaires (déjections des animaux ou engrais de synthèse), même si certaines plantes peuvent aussi capter l'azote de l'air. L'azote utilisable par les plantes est l'azote minéral, l'azote organique devant être minéralisé par les bactéries avant son utilisation. Les besoins des différentes cultures dépendent de leurs caractéristiques spécifiques et des rendements à l'hectare.
Lorsque l'azote apporté aux cultures est supérieur à leurs besoins, il y a risque que l'azote percole sous l'effet des pluies, c'est-à-dire que l'eau qui s'infiltre l'emporte hors de la zone racinaire du sol et qu'il migre vers les nappes phréatiques et les cours d'eau. Pour évaluer l'azote disponible, en plus de l'azote apporté ou capté au cours d'une période donnée, il faut tenir compte du reliquat d'azote n'ayant pas été consommé par les cultures précédentes ou ayant été libéré par la dégradation sur place de certaines cultures (ex : retournement de prairies).
Bilans azotés en 2001 (données Agreste Bretagne n° 45, 2003-1)
Prairies : Bilan azoté en Kg/ha en Bretagne
Déjections au pâturage (azote « non maîtrisable ») | 110 |
Effluents stockés épandus sur prairies (lisiers à 80%) | 50 |
Apports d'azote minéral | 70 |
Azote de l'air capté par les légumineuses (ex : trèfle blanc associé à l'herbe) | 40 |
Total des apports | 270 |
Azote utilisé par l'herbe consommée | 180 à 190 |
Excédent d'azote par rapport aux besoins | 80 à 90 |
Maïs : Bilan azoté en Kg/ha en Bretagne
Azote organique épandu sur maïs (fumiers et lisiers) | 184 |
Apports d'azote minéral | 37* |
Total des apports | 221 |
Azote utilisé par le maïs | 160 |
Excédent d'azote par rapport aux besoins | 41 |
* On estime que ces apports ont diminué de 21 Kg par rapport à 1994
Dans le cas des prairies, le sol reste couvert, ce qui limite les fuites par lessivage. L'azote excédentaire est en grande partie stocké dans le sol sous forme organique (bouses séchées, débris végétaux, micro-organismes du sol) ou dans l'herbe non consommée. Le problème se pose en revanche quand la prairie est détruite pour implanter une nouvelle culture. Le risque existe également d'une accumulation d'azote organique qui va se minéraliser progressivement.
Dans le cas du maïs, les sols restaient souvent à nu après la culture et le risque de lessivage était alors très important. D'où les mesures prises par les pouvoirs publics pour favoriser l'implantation des couverts végétaux après maïs (« cultures intermédiaires pièges à nitrates » telles que moutarde, phacélie ...).
Globalement, à l'échelle de la Bretagne, on estimait en 2001 que l'azote apporté excèdait de 30 % les besoins des cultures. Une partie de cet azote excédentaire est éliminé par le milieu naturel :
- les zones humides ont une action de dénitrification ; elles contiennent des bactéries qui absorbent les nitrates (NO3) et rejettent de l'azote gazeux (N2) ou, dans certaines conditions, des oxydes d'azote (qui font partie des gaz à effet de serre).
- une partie de l'azote peut également être éliminé dans les sous-sols riches en pyrite en l'absence d'oxygène. Deux questions sont néanmoins posées : 1) le produit de la réaction ne risque-t-il pas de perturber la circulation sous-terraine de l'eau en raison de son pouvoir colmatant ? 2) le pouvoir de dénitrification de la pyrite ne va-t-il pas progressivement être s'éroder ?
La plus grande partie des nitrates en excédent ne peuvent pas être éliminés de cette façon : ils vont se retrouver dans les nappes sous-terraines et migrer progressivement vers les cours d'eau et la mer.