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Le Méthane : énergie prometteuse ou géohazard

Mise à jour le 01/11/2014
Par ibalatre
Une synthèse des connaissances sur la gitologie, l'exploitation et les dangers que représentent à la fois les gisements de méthane et leur exploitation notamment sur l'environnement. Différentes activités pédagogiques axées sur les programmes du lycées sont aussi proposées afin d'enrichir par de nouveaux exemples nos activités pratiques.

Sommaire :

1- Synthèse : Quelques données sur la gitologie, l'exploration, l'exploitation et les dangers que représentent les hydrates de méthane.

2- Activités pédagogiques .

 

 

1- Synthèse : Quelques données sur la gitologie, l'exploration, l'exploitation et les dangers que représentent les hydrates de méthane.

 

Découverts par Sir Humphrey Davy en 1810, les clathrates de méthane sont un sujet qui intéresse tant la communauté scientifique que les gouvernements depuis plus d'une trentaine d'années. Cet intérêt toujours d'actualité est lié non seulement à la grande ressource énergétique potentielle que constitue ces clathrates (Fig.1), mais aussi le rôle important sur l'instabilité (Fig. 2) du climat lié à l'émission de ces gaz à fort impact sur l'effet de serre et enfin sur leur impact sur la déstabilisation souvent catastrophique des sédiments tant océaniques que continentaux.

 

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Figure 1 : Hydrate de méthane affleuret à la surface du sédiment océanique (Ifremer) Figure 2 : Echantillon d'hydrate de méthane à l'air libre en train de se déstabiliser et auquel les scientifiques ont mis le feu (Ifremer)

 

Un clathrate (du greg Klathron : fermeture) est une structure dans laquelle des molécules d'eau forment une cage qui encapsule une molécule de gaz (Fig. 3), généralement du méthane (mais aussi H2S, CO2 ou d'autres hydrocarbures à petite chaine carbonée). Cette structure est très favorable à l'accumulation de gaz puisque 1m3 de d'hydrate de méthane contient 170 m3 de méthane gazeux.

 

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Figure 3 : Structure des clathrates de méthane (à gauche) et relations entre les atomes dans le clathrate (à droite; en rouge : oxygène, en blanc : hydrogène de l'eau, en vert hydrogène du méthane en gris : carbone) d'après Römer, 2011.

 

 

Les hydrates de méthane se forment à basse température et haute pression et le plus souvent dans les sédiments marins et le pergélisol.

L'origine du méthane est double : thermogénique ou microbiologique.

 

Il est produit par la catagenèse à grande profondeur dans les sédiments anoxiques des molécules organiques par l'effet combiné de la pression et de la température. La matière organique est craquée en petites molécules entre 75 et 200°C ce qui, en fonction du gradient géothermique, se produit à des profondeurs supérieures à 2km.

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Figure 4 : Biofilms microbien à la surface d'un affleurement d'hydrate de méthane (à gauche) et bactéries méthanogènes (MOB, à droite) - Ifremer.

Le méthane biogénique est produit par les bactéries (archées , Fig. 4) à partir de la dégradation anoxique de la matière organique, immédiatement après sont dépôt. Les archées méthanogènes utilisent soit les produits de fin de fermentation CO2 (réaction 1) ou l'acétate (réaction 2) pour produire le méthane :

 

réaction 1 : CO2 + 4H2 -> CH4 + 2H2O

réaction 2 : CH3COOH -> CH4+ CO2

 

La production par les microorganismes nécessite un taux suffisant de matière organique, des conditions anoxiques, un déficit en sulfate et une température élevée.

La production de méthane par rapport aux autres hydrocarbures, à partir de la matière organique, est plus importante si dégradation est biologique que thermogénique (ration C1>C2+).

On peut connaître l'origine du méthane grâce à ses rapports isotopiques en 13C et D; en effet, comme le montre le graphique (Fig. 5), si le rapport isotopique du carbone est compris entre -50 et -35, l'origine du méthane est thermogénique; en revanche, s'il est plus faible (inférieur à -50), son origine est biogène. Le rapport isotopique du deutérium permet en plus de déterminer quelle réaction métabolique a utilisée la bactérie pour produire le méthane. Une fermentation sera signée par un rapport isotopique très bas (-300 à -350)  alors qu'une réduction du CO2 sera signé par des valeurs comprises entre -250 et -150.

 

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Figure 5 : Comparaison des rapports isotopiques du carbone et du deutérium dans les molécules de méthane afin d'en déterminer l'origine (d'après Whiticar et al., 1999 in Römer, 2011)

 

Le méthane se forme donc dans des lieux où le dioxygène est absent, ce qui est le cas de certaines masses d'eaux (marécages, lacs et mers profonds et peu brassés), ou dans les sédiments ou le sous sol.

 

Une fois formé, le méthane tente de rejoindre l'atmosphère. Ce phénomène est très rapide au niveau des marécages mais devient plus difficile lorsque la colonne d'eau est importante, ou quand le gaz est piégé lors de sa remonté. Il peut être piégé par un niveau imperméable, mais s'il est un environnement très hydraté, il va pouvoir constituer des hydrates de méthane.

Toutes les eaux ne sont pas favorables à la formation d'hydrates. La pression doit être élevée, la quantité de méthane suffisante pour atteindre la saturation et ne plus pouvoir être à l'état dissout dans l'eau, mais surtout il faut que la température soit assez basse.

 

Ces conditions, que l'on retrouve dans les plaines abyssales, n'en font pas pour autant un milieu favorable à la genèse d'hydrates de méthane car les quantités de matière organique qui atteignent le fond sont trop faibles pour atteindre la saturation et donc de constituer des gisements.

En revanche, les talus et les bords de plateformes (Fig. 6) reçoivent de grandes quantités de matière organique; ces zones sont drainées par des eaux froides et peuvent supporter des pressions permettant la stabilisation des hydrates de méthane (Fig. 7).

 

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Figure 6 : Emplacement des principaux gisements d'hydrates de méthane (zones grisées, USCG) Figure 7 : Diagramme de stabilité des hydrates de méthane dans un système triphasé (eau liquide, hydrate et méthane gazeux ; d'après Terry, 1996) 

 

Le diagramme suivant (Fig.8) qui montre que la stabilité des hydrates de méthane dans l'océan est liée aux conditions de température et de profondeur (pression).

Dans les eaux chaudes, aux profondeurs de la plateforme, il est impossible de trouver des hydrates de méthane dans les sédiments. En revanche, si les eaux sont plus fraiches et la plateforme plus profonde (>300 m) on peut s'attendre à ce qu'ils se forment dans le sédiment.

 

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 Figure 8 : zone de stabilité des hydrates de gaz marins (ZSHG; d'après Römer, 2011)

 

Quoi qu'il en soit, le méthane se formant dans le sédiment est instable si ce dernier est trop chaud (gradient géothermique fort). Il est moins dense que l'eau est migre vers la surface du sédiment et, si les conditions (pression/température) sont favorables, il va former des hydrates. 

La limite inférieure où se forment ces hydrates est matérialisée dans la figure 8 par un trait (limite inférieure ZSHG). Au dessous de cette limite le méthane est gazeux et au dessus il est cloitré dans les clathrates. Cette limite inférieure a la particularité d'être un bon réflecteur sismique qui se matérialise sur les profils par un réflecteur d'aspect identique à celui que produit le fond de l'océan. Pour cette raison il est qualifié de BSR pour "Bottom Simulation sismicité reflexion" (réflecteur simulant le fond marin; Fig. 9).

 

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Figure 9 : Observation de la BSR sur le profil sismique de la marge de Caroline du Sud - USA (Phrampus & Hornbach, 2012) Figure 10 : Interprétation des profils sismiques, localisation de la zone de stabilité des hydrates de méthane dans le permafrost d'Alaska (Collet, 1993)

 

On trouve donc des hydrates entre le plancher océanique et la BSR.

 

Aux très basses températures des climats arctiques et montagnards, le sol est gelé en permanence, c'est le pergelisol ou permafrost. Dans ces sous sols froids, la dégradation de la matière organique est mauvaise et si le géotherme est favorable, à certaines profondeur la méthanogenèse a lieu. En remontant vers la surface, le méthane est piégé entre les molécules d'eau présentes dans la roche ou le sol et constitue des gisements d'hydrates au dessus de la BSR ; réflecteur observable là aussi sur les profils sismiques (Fig. 10).

 

Si les sédiments océaniques constituent les plus importants gisements potentiels, le permafrost reste cependant le plus sensible aux modifications climatiques actuels. En effet, le réchauffement atmosphérique impacte celui de l'eau, mais les transferts thermiques en profondeur sont très lents. En revanche, la fonte des glaces et les températures très élevées qui touchent actuellement les régions du cercle polaire ne permettent pas le maintien du permafrost qui se déstabilise et créé d'impressionnants cratères (Fig.11).  Les clathrates se déstabilisant, le méthane va facilement atteindre l'atmosphère où il s'oxydera lentement.

 

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Figure 11. Cratère observé en juin 2014 en Sibérie. (crédit photographique: Scientific Centre of Arctic Studies in Salekhard)

 

Il en est autrement dans l'eau.

Si les marécages libèrent facilement leur méthane, les suintements de méthane au fond de l'océan ne suffisent pas à le libérer en quantité mesurables dans l'air. Seul de gros panaches cataclysmiques (plumes, Fig. 12) permettent de libérer de telles quantités de gaz que la mer ne peut pas les dissoudre (les "absorber"). Des études menées au niveaux de volcans de boue en Mer Noire notamment montrent que les bulles émises par les suintements sont rapidement recouvertes de clathrate, ce qui montre que le gaz a du mal à rejoindre la surface (Römer, 2011). Cependant, les expulsions massives produisent des anomalies de la concentration de méthane dans l'atmosphère mesurable à la surface de l'eau (+8ppm; Shakhova et al. 2010) et par satellite (Fig. 12).

 

 

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Figure 12 : Emission de méthane; à gauche : plumes de méthane remontant du fond de l'océan Pacifique au niveau de Vancouver (Römer, 2014); à droite : émission de méthane dans l'atmosphère au large des côtes de Sibérie (Shakhova ., 2010)

 

Le méthane est un gaz à effet de serre puissant. Bien que beaucoup moins abondant dans l'atmosphère que le CO2 (17%), il a un pouvoir de réchauffement plus de 20 fois plus important que celui-ci. Jusqu'aux périodes d'industrialisation massive de notre planète, le méthane atteignait des concentrations atmosphériques de l'ordre de 750 ppm; il avait atteint en 2000 la concentration de 1750 ppm (Cicerone et Oremland, 1988). L'exploitation des hydrates de méthane reste donc un problème sérieux malgré les besoins énergétiques croissant de l'humanité car deux évolutions possibles liées au méthane peuvent dégrader le climat :

  • l'utilisation par l'homme du méthane va accroitre le taux de CO2 atmosphérique après combustion, d'où les effets indirects sur l'effet de serre.
  • si les zones qui contiennent des hydrates se réchauffent, les clathrates seront déstabilisées et le méthane sera relargué inexorablement dans l'atmosphère et agira directement sur l'effet de serre.

Le permafrost sera/est déjà touché, les sédiments marins suivront mais avec un délais plus important (1 siècle selon les auteurs).

 

De nombreuses sociétés gazières ont depuis plusieurs décennies lancé des campagnes de recherche des gisements et plusieurs ont déjà mis au point des processus d'extraction qui se sont révélés suffisamment efficaces pour envisager une exploitation à grande échelle (USCG, 2014).

Mais avant tout, pour exploiter un site, il faut tout d'abord le trouver.

Les données sismiques sont assez efficaces, mais il est nécessaire de confirmer la présence de clathrates par des forages. Les forages ne sont pas évidents à réaliser car, dès que la pression diminue les hydrates se déstabilisent et disparaissent de la carotte.  Des techniques de confinement du sédiment carotté sont nécessaires pour remonter des échantillons exploitables. 

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Figure 13 : Photographie des échantillons et du carottage de Permafrost de Qinghai, Chine (a et b : pyrite , c et d : bulles d'eau à la surface du sédiment , e : ébullition et enflamment du méthane au niveau de la carotte - Wang et al., 2014)  Figure 14 : Evolution de la concentration en sels chlorés et de la température au niveau d'un banc riche en hydrate de méthane (ODP, 204)

 

D'autres données  peuvent renseigner de la présence d'hydrates dans le puits de forage comme (Fig 13 & 14):

  • la température qui va brusquement diminuer lorsque le gaz se dissocie localement de l'eau, les niveaux où la sonde thermique enregistre ces variations sont de bons indicateurs des niveaux contenant des hydrates.
  • de brusques augmentations de la concentration en sels chlorés dans l'eau interstitielle est aussi un bon marqueur, car lors de la formation des hydrates, des sels sont expulsés vers l'eau interstitielle présente dans les sédiments.

Cependant la présence d'hydrate dans la carotte ne permet pas de quantifier la proportion réelle en méthane car les gisements sont très hétérogènes spatialement. Ainsi l'évaluation des quantités stockées d'hydrates présentées dans la presse (10000 milliards de Tonne de carbone - USCG, 2000) sont à prendre avec prudence.

En fonction des gisements, la granulométrie et la porosité est variable (Fig. 15 & 16)

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Figure 15 : Comparaison des sédiments (porosité, perméabilité) de quelques sites étudiés et potentiels d'exploitation (d'après Boswell et al., in MH Science Plan Final, 2013) Figure 16 : Sédiment potentiellement très favorable à l'exploitation (x3,5) en blanc le remplissage des pores par les hydrates de méthane (Geoexpro)

 

Ainsi, par exemple, dans le gisement de Blake Ridge (côte de la Caroline du sud, Fig. 17), la porosité est importante mais la perméabilité ne l'est pas, les hydrate de méthane sont peu concentrés dans le sédiment et difficilement exploitables et, à l'inverse, dans le Golf du Mexique (Fig. 18) ou dans la fosse de Nankai (côte est du Japon, Fig. 19), les hydrates sont contenus dans les sables dont la porosité est moins importante mais la perméabilité est telle que la saturation en hydrate de gaz est importante. Ce sont donc des gisements plus intéressants à exploiter.

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Figure 17 : Localisation des gisements de Blake Ridge (ODP) Figure 18 : Localisation des gisements du Golf du Mexique (USCG) Figure 19 : Localisation des gisements de la fosse de Nankai (Noguchi  et al., 2011)

  

Plusieurs expériences ont été menées pour les exploiter (Fig. 20) :

  • par dissolution des hydrates par injection de vapeur ou d'eau chaude.
  • la dépressurisation par pompage du méthane associé au sédiment.
  • l'injection de méthanol ou de glycérol pour déstabiliser les hydrates.
  • la substitution par du CO2.

 

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Figure 20 : Schéma simplifié expliquant les différentes méthodes d'extraction de méthane testées (d'après MMHFRP, 2013)

 

Ce dernier processus a été testé in situ dans les champs gaziers et pétrolifères de Prudhoe Bay au nord de l'Alaska sur la côte de la mer de Beaufort (Fig. 21).

 

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Figure 21 : Localisation et photographie des champs de Prudhoe Bay (USCG-Alaska 2013 )

 

Actuellement deux sites, l'un en eaux profondes (Fosse de Nankai, Japon) et l'autre au niveau du permafrost (Prudhoe Bay, Alaska) se sont révélés potentiellement exploitable (Fig. 22)

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Figure 22: Etat des lieux et prévisions (MMHFRP, 2013)

 

Mais la commercialisation ne sera probablement pas efficace avant la fin de la décennie car des problèmes restent encore à régler.

Le transport du gaz de sont lieu d'extraction aux structures d'exploitation et le stockage nécessitent des infrastructures à élaborer.

Par exemple, dans le cas des gisements d'Alaska, les côtes de la mer de Beaufort (au nord) ne sont pas navigables à l'année et le méthane devra être transporté jusqu'à la côte méridionale de l'état. Le pétrole produit dans la même zone est transporté jusqu'au terminal pétrolier de Valdez au sud de l'Alaska dans un gigantesque pipeline le TAPS (Trans Alaska Pipeline System - Fig 24) de 1300 km de long,  puis dans des tankers au travers des mers.  Il est donc nécessaire de construire un gazoduc trans-Alaska (Fig. 23). Ce projet est est cours de validation et le gaz produit à Prudhoe Bay pourrait arriver à Anchorage au Sud de l'Alaska.

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Figure 23 : Trajet probable du gazoduc trans-Alaska (ASAP, 2011).  Figure 24 : L'Alaska une région hautement sismique: en haut : carte des aléas sismiques et du trajet du TAPS (AEIC) étoile : séisme du 11/3/64 magnitude 9.2 - en bas : efficacité du système de compensation des mouvements de terrain élaborés pour le TAPS, vues prises avant et après un séisme (Hall et al., 2003)

 

Cependant ce projet est très risqué, en effet l'Alaska est un des endroits sur terre les plus sensibles aux risques sismiques. Le deuxième plus grand tremblement de terre du siècle a eut lieu en Alaska (magnitude 9.2 le 11 mars 1964, étoile de la Fig. 24). Une gigantesque zone de cisaillement (Denali Fault) découpe le sud de l'Alaska et joue régulièrement au fur et à mesure que le Pacifique subducte sous l'arc aléoutien dont l'Alaska fait parti. Des structures parasismiques ont été mises au point pour protéger le TAPS (Fig. 24) mais certains éléments ont cependant beaucoup souffert lors du séisme de 2002 d'une magnitude 7.9 qui a entrainé un coulissement horizontal de 8m des 2 compartiments l'un par rapport à l'autre (http://walrus.wr.usgs.gov/geotech/denaliposter/pipeline.html). Mais le trajet prévu du gazoduc recoupe non seulement la Denali Fault mais aussi un autre système coulissant plus au sud. La construction de ce pipeline devra donc être extrêmement solide.

Les tremblements de terre  peuvent aussi en déstabilisant les sédiments induire des relargages de méthane. Des études portant sur les plumes de méthanes (Römer, 2010) montrent que bien que les séismes soient fréquent sur la marge active au large de Vancouver (Fig. 12), ce ne sont pas ces phénomènes qui sont responsables des émissions pulsatiles de plumes mais en revanche les marées. Par leur action régulière de diminution et d'augmentation de pression de l'eau sur le gisement, les marées ont un effet "pompant" sur le méthane.

D'autre part, d'autres études (Kawagucci et al. 2012) ont montré les effets sur la déstabilisation des hydrates de méthane synsédimentaires sur la marge active après le méga séisme de Tohoku (M9.0 - 2011). Des mesures effectuées sur le talus près de l'épicentre du séisme et ont montrés que le jeux des failles avait conduit à la libération du méthane contenu dans les sédiments. Il est à noter que cette zone n'est pas reconnue comme un site potentiel d'extraction et que bien que les concentrations soient faibles, elles ont cependant entrainé un accroissement de la concentration de méthane dans l'eau.

Aucune donnée n'a pour l'instant été trouvée sur les effets de ce séisme et surtout du tsunami qui l'a suivi dans les importants gisements de la fosse de Nankai, certes, plus au sud, ni de la résistance des plateformes probablement en place à cette époque. On peut cependant s'inquiéter des effets d'un tremblement de terre dans la zone de subduction de Nankai.

Les marges passives riches en hydrates de méthane sont elles aussi des zones à risque comme les études réalisées au large de la Norvège l'ont montré. La déstabilisation des hydrates de méthane des bords du talus est liés au réajustement isostatique et à la variation de la température des eaux suite aux déglaciation. Ce phénomène a provoqué à plusieurs reprises de gigantesques glissements de terrains, responsables d'importants tsunamis dans l'Atlantique nord (Bryn et al., 2005). Le cas le plus connu est la Storegga slide dont le tsunami a fortement touché les côtes Ecossaises (Fig.24).

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Figure 24 : Emplacement du glissement de terrain de Storegga slide (à gauche) et hauteur des vagues mises en évidence par les  tsunamites.

 

La déstabilisation des gisements d'hydrates de méthane est un phénomène en cours, des recherches récentes essayent de quantifier les modifications des caractéristiques thermiques du Gulf Stream et de calculer ces effets sur la déstabilisation des hydrates des gisements la marge de l'Atlantique nord-ouest (Fig. 25; Phrampus & Hornbach, 2012). L'effet sera beaucoup plus fort dans le cercle arctique et certains scientifiques préconisent qu'on exploite le plus rapidement possible ces gisement avant que le gaz soit libéré dans l'atmosphère.

 

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Figure 25. Effet de la modification du thermocline sur le déplacement de la BSR et le relargage du méthane.

 

Cependant, la déstabilisation accidentelles de gisements comme ce qui s'est passé dans le Golf du Mexique (catastrophe de la plateforme Deepwater Horizon en 2010) et donc des fuites importantes dans l'atmosphère est difficilement contrôlable et représente un risque majeur de l'exploitation des hydrates de méthane.

 

 

Références :

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  • Cicerone, R.J. and Oremland, R.S., 1988. Biogeochemical aspect of atmospheric methane. Global Biogeochemical cycles, 2(4), 299-327.
  • Geoexpro : http://www.geoexpro.com/articles/2009/02/gas-hydrates-not-so-unconventional.
  • Hall, W.J., Nyman, D.J., Johnoson, E.R. and Norton, J.D., 2003. Performance of the trans-Alaska pipeline in the november 3,2002 Denali Fault earthquake. 6th U.S. Conference and Workshop on lifeline earthquake engineering, ASCE technical Council, Long Beach, Ca, auguste 2003. 13 pp.
  • Ifremer : http://wwz.ifremer.fr/grands_fonds/Les-enjeux/Les-applications/Ressources-energetiques/Les-hydrates-de-gaz.
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  • Kessler, J.D., Valentine, D.L., Redmond, M.C., Du, M., Chan, E.W., Mendes, S.D., Quiroz, E.W., Villanueva, C.J., Shusta, S.S., Werra, L.M., Yvon-Lewis, A. and Weber, T.C., 2011. A persistant Oxygen Anomaly Reveals the Fate of Spilled Methane in the Deep Gulf of Mexico. Science, 331, 312-315.
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